SAMEDI 4 JUIN 2016
de 14h00 à 19h00

dans le cadre du cycle
"Le conseil des Grandes Plumes - année 2"

Animation : Régis MOULU

Thème :

Ecrire, c'est d'abord une sécrétion (Céline)

Dans L'église, Louis-Ferdinand Céline émet l'idée que l'écriture est une sécrétion.. et même que ce serait dégoûtant ! En partant de cette idée qui place l'inspiration sur un plan physique, hormonal, brut, d'une sincérité animale, nous rédigerons un texte sans concession, sans fabrique, sans cosmétique !

Remarque : au-delà de la contrainte formelle (thème), ce sujet a été lancé en ouverture : Vous êtes un « coach de vie » à qui on a confié la tâche de détendre et humaniser un robot (androïde ? automate ? cyborg ? robot agricole ? Pinocchio ?...). Vous allez donc révéler une séance de travail, votre approche, vos conseils promulgués, votre tactique…
Pour stimuler et renforcer l'écriture et les idées de chacun, un support portant notamment sur l'inspiration par l'intuition animale a été distribué en ouverture de session.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Ci-après quelques textes produits durant la séance, notamment (dans l'ordre):


- "Humain, trop humain" de Christiane FAURIE

- "Les potentiels de l'impuissance" de Marie-Odile GUIGNON

- "L'éternel féminin" de Janine NOWAK

- "L'édredon aux 32 pinces " de Régis MOULU

 


"Humain, trop humain" de Christiane FAURIE


Humain, trop humain. J’étais restée là trop longtemps, telle une larve tout juste bonne à aspirer la nourriture à ma portée. Hébétée par tant de souffrance, j’ai accumulé un océan de rancœur dont je me déleste aujourd’hui sans pudeur, dépouillée de tout artifice. Mes épaules peinent encore à afficher un haussement d’insouciance. Les regards se détournent encore trop souvent à mon passage ; sans doute la transparence de mon corps ou la répugnance qui s’en dégage. J’avoue que je n’en souffre plus. J’en suis même satisfaite. Plus de faux semblants, plus de dégoût de voir l’autre inventer sa vie pour me plaire. Plus de rage à découvrir la veulerie, plus de soumission pour espérer faire partie du cercle. J’en étais là de ma vie quand Richard me parla de ses recherches actuelles sur les robots androïdes. Une grande firme américaine souhaitait sa collaboration pour perfectionner un de leur prototype visant à l’autonomisation des personnes dépendantes suite à des atteintes neurologiques. Alors que je lui contais mes déboires sentimentaux et mon mépris pour l’Homme, ses yeux s’illuminèrent tout à coup et il me demanda tout de go si j’étais prête à participer au programme de recherche engagé afin d’humaniser un robot. Les épreuves que j’avais traversées et l’accumulation de matière que j’avais conservée afin de rendre l’Homme perfectible aux yeux de ses semblables lui semblaient convenir pour repenser l’être artificiel en sa possession. Remise de ma surprise, je considérais cette offre comme une revanche. Dès le lendemain, je partis à la rencontre d’ANHDUS (androïde Non Humanisé Domestique à Usage Sensoriel). De taille raisonnable pour s’installer dans tout intérieur modeste, ses yeux étaient dotés d’un clignotement incessant mais vide d’expression. Ils n’exprimaient ni la surprise de notre rencontre, ni le bonheur de me voir, ce qui me laissa songeuse. Il fallait commencer par là. Le regard c’est le lien, l’identité, le miroir de l’autre. Alors que je m’interrogeais sur ses capacités, une voix nasillarde et métallique me salua. Certes c’était parfait pour des malentendants mais peu chaleureux. J’imaginais alors de concevoir un logiciel développant l’expression sensorielle couplé à un logiciel langage afin d’adapter des réponses moins stéréotypées. Remplacer « ménage fait, repas prêt… » par, désirer vous passer à table ? le ménage vous convient-il ?... » invitait au dialogue. Pendant des mois, j’ai enregistré des histoires à l’eau de rose sur une puce électronique que j’installerai dans son disque dur afin de décoder une foule de manifestations affectives chez son utilisatrice et y répondre de manière adaptée. Mais n’y a t’il pas un leurre à ne faire entrer que des émotions positives ? Richard dit qu’on ne doit pas le réduire à un bisounours. Il a raison même si ce serait bien tentant, une manière de prendre ma revanche sans doute ? Mais la vie c’est exprimer de la colère, du dégoût, de la haine parfois. Alors va pour les expressions négatives aussi. Je pourrais installer des capteurs au niveau des pectoraux, du cortex, des mains et des pieds. Afin d’analyser les commandes et de les interpréter selon les décharges de sa partenaire. L’idée de transporter ANHDUS chez Madame Cardoso, ma voisine, m’a parue évidente dans cette phase expérimentale afin de confronter ANDHUS à la réalité hors laboratoire. Madame Cardoso est très âgée, seule et en perte d’autonomie certaine mais elle n’est pas dotée d’un caractère très conciliant, c’est le moins qu’on puisse dire. Je lui présentais le projet et à ma grande surprise elle l’accueillit avec enthousiasme, ce qui ne présageait rien de bon ! Quelques jours plus tard, ANDHUS pris place dans le salon en lançant un bonjour tonitruant, ayant perçu la surdité de la dite Cardoso. Pour toute réponse, il reçut un coup dans le plexus car elle venait d’installer ses appareils auditifs, recevant ainsi une décharge de décibels insupportable. Les informations d’ANHDUS mettaient trop de temps à être analysées, il faudra y remédier. Une fois cette présentation faite, Madame Cardoso crut bon de passer à l’attaque. Elle asséna des ordres dans tous les sens. « J’aime qu’on soit ponctuel, il faudra vous enfoncer ça dans le crâne. Préparez moi mon café, je l’aime fort mais long, vous trouverez tout ce qu’il vous faut dans la cuisine. J’espère que vous savez faire le ménage car je suis intraitable sur ce sujet. Et les courses, vous êtes capables de porter quelle charge ? Et les vitres, vous savez ? Moi je joue au scrabble mais je n’ai plus de partenaires, elles sont toutes séniles. Il faudra apprendre… » C’était un vrai festival ! ANDHUS marqua alors des signes tantôt d’étonnement, puis d’affolement passant par la perplexité. Je pouvais vérifier que le logiciel émotion était bien en place ? Parfait. Mais tout à coup, il se mit à tourner dans tous les sens en criant, en chantant à tue tête et en débitant des mots d’amour. Je dus poser mes mains sur les capteurs sensoriels pour le calmer. Je sermonnais Madame Cardoso, et à cet instant précis je me demandais s’il valait mieux humaniser Madame Cardoso pour qu’ANDHUS réponde au mieux à ses attentes ou reprogrammer ANDHUS pour supporter toutes les émotions contradictoires sans griller son disque dur. Je devais anticiper chaque sentiment pour programmer chaque comportement ; Un travail de Titan. Cette tâche monumentale laisse espérer que demain le robot ne pourra pas remplacer l’Homme sur terre. Enfin, peut-être ?

 

"Les potentiels de l'impuissance" de Marie-Odile GUIGNON


La solitude est un puits qui nous entraîne vers des abîmes obscurs. Il fallait que ma raison refuse de les sonder. La musique ne comblait plus les heures perdues de mon existence, mes murs exhalaient la froideur de l'indifférence. Pourtant la coquetterie de mon intérieur entretenu par mon robot domestique resplendissait de dynamisme. La machine, dotée d'un programme infaillible, d'une finesse technologique, possédait la raideur de la perfection. J'éprouvais alors un tel sentiment d'inutilité que subitement, envahi d'une rage destructive, un flots d'injures dégoûtantes se déversèrent sur sa carapace métallique, lisse et brillante… Lui, stoïque reçut ces ondes nocives avec le calme d'un submersible. Épuisé par la colère, je sombrais dans un flots de sanglots déversant sur un coussin mon chagrin humide…...........................................................
Voilà-t-il pas que ce monstre de technologie s'en fut quérir un oreiller sec pour me l'offrir, comme si, subitement, ma détresse l'avait touché ?… D'un seul coup, mon cœur s'est soulevé, admiratif ! Désappointé, ma vie subitement a basculé ! Il est donc possible d l'humaniser ?.....................................................
Ce matin, je suis à l’œuvre pour la première séance d'humanisation. Dès mon réveil, je viens le saluer d'un « Bonjour » amical et le prie de me tenir compagnie pendant mon petit déjeuner... Sur la table, il a déjà tout préparé… Je le remercie chaleureusement et lui demande de s'asseoir devant moi. Je le dévisage avec gentillesse et lui fait part de ma décision, je souhaite qu'il échange son aspect machinal de standard avec celui d'un ours polaire au poils soyeux si doux au toucher, comme l'ourson de mon enfance, mon compagnon et confident… Il détourne la tête… perfectionnée comme elle est, elle s'en va ailleurs !… Vers les tâches matérielles à effectuer... celles du quotidien dont il suit les injonctions...les miennes sont en déroute… Dès qu'il s'arrêtera de s'occuper du lave-vaisselle, de faire le lit, de ranger ça et là, d'avaler la moindre poussière, de plier mes vêtements, de faire l'inventaire des provisions… Dès qu'il prendra sa garde dans le salon, je me mettrai à son niveau pour scruter « ses yeux » ses capteurs supérieurs, après avoir neutraliser les autres. Ainsi, face à face, regard dans regard, je l'obligerai à sonder mes désirs, ma volonté de le faire accéder à d'autres perfections, nobles, humaines, à sublimer sa programmation. Alors en attendant cet événement moi aussi je range, je lave, j’inventorie pour lui dégager du temps… Ensuite, quand il s'immobilise, je tente l'approche. A peine ai-je recouvert quelques unes de ses caméras hors champ de ce qui me concerne, qu'il lance un signal de détresse strident indiquant la nécessité de les libérer ! C'est comme une colère !!! Affolé je m'enfuis au fond de l'appartement… Dans mon bureau… L'automate reprend ses droits, hermétique à mes rêves, il doit travailler avec toutes se capacités, il est un professionnel. Une aversion s'insinue dans mon âme, je suis dégoûté de mes semblables scientifiques, capables seulement, uniquement, de concevoir le perfectible qui glace le cœur. Je plonge dans une léthargie dangereuse, noyé de désespérance, je m'enfonce dans un fauteuil les pupilles hagardes… Un léger froissement me ramène à la réalité. « Il » est là près de moi ! Il me tend un livre… C'est : Le petit prince, cette histoire écrite par l'écrivain A. de Saint-Exupéry… !!! Serait-ce un : « S'il te plaît, apprivoise-moi... » ???

 

"L'éternel féminin" de Janine NOWAK


(Aparté : Graziella ? Gwendolina ? Carmen ? Comment vais-je l’appeler, cette beauté ? Beauté brune, méditerranéenne, tel était mon choix. Voyons voir, réfléchissons… Un physique plus italien qu’espagnol. Donc, éliminons Carmen. Décidemment, Graziella me plait bien). S’adressant à la ravissante jeune-femme qui attend paisiblement assise sur le canapé : Viens ici, ma jolie, et écoute bien ce que je vais te dire. Tu oublies ton nom actuel qui est 2390 G 94. Dès à présent, tu t’appelles Graziella. Allez, répète après moi : je suis Graziella. « Je suis Graziella ». Bon début ; tu es docile et ta voix est plaisante. Nous allons désormais vivre ensemble, dans ce beau et grand appartement. Comment trouves-tu cet appartement, Graziella ? « Cet appartement est beau et grand ». Ma chère Graziella, j’apprécie ton obéissance, mais ne te crois pas obligée de reproduire mot pour mot ce que je dis. Essaie de faire preuve d’imagination et de réfléchir par toi-même. Je répète ma question : Graziella, comment trouves-tu cet appartement ? « Cet appartement est beau, et grand… et clair ». Bien, Graziella, je suis content de toi. Autre question : où es-tu née, Graziella ? « Je suis née… je ne sais pas où je suis née ». Si Graziella, tu sais où tu es née. Dis-le-moi. « Je suis née dans ce beau, grand et clair appartement ». Hé, hé, tu n’es pas sotte, Graziella ! Après tout, cette réponse a du sens. Mais vois-tu, afin que nous nous sentions plus proches l’un de l’autre, nous allons t’inventer un passé. Nous allons décider que tu as 23 ans, et que tu as vu le jour à Naples, en Italie. Je vais te montrer sur mon Atlas où se trouve ton lieu de naissance. Regarde aussi ces photographies. Ce ciel et cette mer d’un bleu intense. Aimerais-tu visiter cet admirable pays ? Je t’y conduirai d’ici quelques temps. Ce sera bon pour ton éducation de découvrir le soleil, la douceur de vivre, les parfums. Il faut que tu apprennes à faire travailler tes sens, à les affiner. Nous avons cinq sens. En ce qui concerne les deux premiers, la vue et l’ouïe, j’ai déjà pu constater qu’ils fonctionnaient parfaitement bien. Alors, passons au toucher. Donne-moi tes mains, Graziella. Elles sont douces, tes mains. Que penses-tu des miennes ? « Elles sont douces ». Non, Graziella. Mes mains sont dures, sèches, nerveuses. Apprends à faire la différence. Allez, un petit effort. Je sais que tu as du vocabulaire. Examine mes mains et dis-moi. « Vos mains sont dures, sèches, nerveuses… et calleuses ». Formidable, Graziella ! Je fais de l’aviron et de ce fait, une sorte de corne s’est installée dans mes paumes. Tu l’as bien senti. Bravo ! Plus subtil, à présent : l’odorat. Il existe de bonnes fragrances, délicates, fortes, fruitées, épicées, florales. Un choix infini. Et puis, il y a les odeurs nauséabondes, écœurantes. Approche-toi de ce bouquet et dis-moi si cette senteur te plait. « Oui, cette senteur me plait ». A présent, Graziella, respire cet aliment que je conserve depuis plusieurs semaines en prévision de ces tests. Je vais ouvrir cette boîte et tu vas humer aussitôt. « Oui, cette senteur me plait ». Non Graziella, tu me déçois ! Cette boîte contient une pomme de terre pourrie et c’est ignoble. Tu ne peux pas dire que tu aimes ! Il faut absolument que tu fasses la distinction. Bon, on reviendra sur le sujet une autre fois. Pour terminer, le goût. Voici un récipient contenant des agrumes. Je vais te faire savourer un quartier d’orange et un de citron vert. Dis-moi lequel de ces deux fruits est le plus doux ? « Ils sont doux tous les deux ». Ah, Graziella, je vais devoir sérieusement éduquer tes papilles gustatives. Mais sautons à l’essentiel. Vois-tu, Graziella, je ne veux pas seulement être ton pédagogue. Je tiens aussi à ce que nous soyons amis. Et je souhaite par-dessus tout, que notre vie soit harmonieuse. Tu as été programmée pour être soumise et admirative. C’est d’ailleurs très rassurant de savoir que tu es incapable d’une quelconque agressivité et que tu n’auras jamais à mon encontre, ni mépris, ni aversion, ni répugnance. Seulement, et là, je suis peut-être trop exigeant, mais j’aimerais tant que les bons sentiments que tu exprimes à mon égard, ne soient pas dictés par ta condition, mais émanent du plus profond de toi. Ce serait plus flatteur pour mon égo ! Et arriver à te donner une véritable humanité, quelle belle victoire ! Mais comment ? Il est déjà difficile de jouer les Pygmalions avec un être humain. Quasi impossible avec un animal. Alors, avec un robot ? (Aparté : Par la douceur et la gentillesse, je n’arriverai à rien. Elle est confiante et sereine. Et si j’essayais de la titiller ? Pourrais-je la surprendre, la contrarier ? Voire, la faire sortir de ses gonds, afin qu’une vraie colère la gagne ? Qu’elle enrage, même ? Et si je tentais la jalousie ? C’est très féminin, ça, la jalousie ! Je vais me trouver un autre robot, une très grande blonde aux yeux bleus, son opposé). Trois jours plus tard. Graziella, je te présente Hildegard, notre nouvelle compagne. Regarde comme elle est belle. C’est une Princesse suédoise, descendante du Roi Erik, le Viking. J’espère que vous serez bonnes amies. Graziella, tu vas être assez aimable pour donner à Hildegard le joli bracelet que je t’ai offert avant-hier. Il fera plus d’effet sur sa belle peau blanche que sur ton poignet bronzé. (Impassible, Graziella décroche le bijou, le tend à Hildegard et retourne s’asseoir). Oh, et puis à l’avenir, Graziella, essaie de porter des talons hauts ; tu manques de chic. A côté de la charmante Hildegard, tu as l’air d’une naine ! (Ai-je rêvé ? Un court instant j’ai cru voir une lueur s’allumer dans son regard ?) Et enfin, ma chère Graziella, tu vas laisser ta chambre à Hildegard ; tu te contenteras de la banquette dans l’entrée. « Non ! » Qu’est-ce que j’entends ? Non ? « Non, non, non et non ! » Pourquoi ce refus si catégorique, Graziella ? « J’étais là avant elle. Tu m’as choisie petite et brune, car c’est dans tes goûts. Tu m’as dit que j’étais belle, ravissante, même. Tu m’as donné un nom, une vie, un passé, Tu fais mon éducation. Voici trois jours, j’étais seulement une chose, ta chose. Mais aujourd’hui, j’ai dépassé ce stade. Je ne suis plus un bel objet. J’existe. Tu entends ? J’existe ! Je suis MOI, Graziella, heureuse de vivre auprès de toi. As-tu remarqué ? Je ne te vouvoie plus, j’ai pris la liberté de te tutoyer. Je te parle, d’égale à égal. Aussi, je t’en prie, fais-la partir cette grande bringue… Je t’aime ! »


"L'édredon aux 32 pinces" de Régis MOULU, animateur de l'atelier


C pour Le coach de vie
R pour le robot

C – Cool ! Cool ! Les lames du store vénitien pivotent à moitié, mi-ombre mi-lumière, le « mi-précision mi intuition » règne, nous chapeaute, le jus dans tes circuits ralentit, tout en toi fait l'édredon, peut-être te lancerais-tu dans un voyage en ballon ! c'est ce que tu entreprends, tes barres, tes rotules et tes boulons sont sur la Lune, c'est-à-dire légères, légères, légères, comme du tungstène lyophilisé, bref ! ton courant diminue, diminue, tes antennes se dégonflent et tes calculateurs redeviennent un nid où couve ton bien être plein de résolutions, de douceur : en vrai, un lâcher de sucre te confit, te bonifie, et tu te sens bien, libre et relâché comme une barque à la dérive sur son lac préféré, là où les nénuphars qui apparaissent sont tes rêves à la chlorophylle…

R – (protestant, objectant) Oenbouska ! plouto klöt you, klöt you !

C – Non mais peu importe ! peu importe ! c'est de la métaphore, tu n'en rouilleras pas !

R – (légèrement mutin, revanchard) Pruiteïtré ! pruiteïtré !

C – Si tu veux ! si tu veux ! de toute façon, ça ne changera pas grand-chose. Et mets-toi bien le computer que le plus important, c'est la réussite de ta socialisation, de TA SO-CIA-LIS-A-TION ! Et enlève ta pince de ton capteur, je suis en train de te détendre !

R – (concédant) Miessijissuitägoürd !

C – Bien ! Je reprends, tu réencodes STP : « stores - édredon - ballon - Lune - nid - barque - nénuphars - rêves » et ensuite tu es envahi de sérénité comme si de la pâte à tartiner au chocolat et à la noisette t'enrobe tous les boîtiers, te gaine les circuits. Cool ! Cool ! cette pâte à tartiner intérieure ! C'est une sorte de masque intime, tu fais donc la tartine qui reçoit une cuillère de Nutella et qui va se faire napper avec délicatesse, ivresse et petits mots balsamiques, ronrons et râles de plaisir.

R – Touïpétouyourmansque dé gniiin opriss, mert' !

C – Dis-toi bien que tu n'es pas obligé de parler !... pour peu que « striduler », ce soit « parler » bien sûr ! Et articule si tu veux te faire comprendre, c'est une politesse, et ça devrait même être la première pierre (ponce) à poser pour édifier TA SO-CIA-LIS-A-TION ! SO-CIA-LIS-A-TION !

R – Klakaaaa !

C – M'ouais, il reste encore du chemin à faire ! mais je ne m'énerverai pas, je suis coach. Bon, après l'instant Ferrero, il est plausible que tu atteignes un état de plénitude, si tu le veux, et tu le veux ! ta carte-mère vient de t'abandonner : tu es en vacances ! pour toi c'est cocktail Lockheed à volonté et dialyse au liquide de refroidissement, ton compteur est en berne, et toute ta boîte à Mécano est au repos, comme bien rangée, neuve… donc hors de la portée des enfants. Comme jamais, tu te décontractes de la membrane, et tous tes voyants sont désactivés, semblent bien camouflés, insoupçonnables…

R – Goüttt ! goüttt !

C – Ben si on peut dire, oui ! Un hélicoptère silencieux, telle une carpe bâillonnée par l'eau azure qui l'entoure apparaît au loin. Il est joli à l'instar d'un caméléon en ce sens où il change de couleurs comme si Dieu jouait avec le variateur du soleil, bref, il s'approche de toi telle une pieuvre en mal de couvage ! Et juste au moment où il te surplombe, les stores vénitiens sont un peu plus fermés, tu reconnais le camembert de la fortune avec ses parts multicolores, il y en a (4x3x2)+8, o.k. ?! Ainsi, à la grande loterie de la vie, tu vas être doté de 32 pinces supplémentaires, et déjà ton bras articulé s'en réjouit, exécute la danse de l'extase immobile…

R – Tsékoi ! tsékoi ! tsékoiksa ?

C – Sois patient : toute quête est préférable à toute possession. Donc, dans le kit de la socialisation, tu vas bénéficier de : 1. la pince de l'amour qui t'est couplée, 2. la pince de l'acceptation qui t'est associée 3. la pince de la confiance qui t'est agencée 4. la pince de l'admiration qui t'est adjointe 5. la pince de la soumission qui t'est soudée 6. la pince de l'appréhension qui t'est appariée 7. la pince de la peur qui t'est ferrée 8. la pince de la terreur qui t'est rivée 9. la pince de la crainte qui t'est corrélée 10. la pince de la distraction qui t'est affiliée 11. la pince de la surprise qui t'est conglutinée 12. la pince de l'étonnement qui t'est connectée 13. la pince du désappointement qui t'est emboîtée 14. la pince de la songerie qui t'est assortie 15. la pince de la tristesse qui t'est scellée 16. la pince du chagrin qui t'est branchée 17. la pince des remords qui t'est raccordée 18. la pince de l'ennui qui t'est emboutie 19. la pince du dégoût qui t'est agrégée 20. la pince de l'aversion qui t'est annexée 21. la pince du mépris qui t'est maillée 22. la pince de la contrariété qui t'est rattachée 23. la pince de la colère qui t'est reliée 24. la pince de la rage qui t'est câblée 25. la pince de l'agressivité qui t'est greffée 26. la pince de l'intérêt qui t'est incorporée 27. la pince de l'anticipation qui t'est fusionnée 28. la pince de la vigilance qui t'est accolée 29. la pince de l'optimisme qui t'est offerte 30. la pince de la sérénité qui t'est enchaînée 31. la pince de la joie qui t'est brochée 32. la pince de l'extase qui t'est adaptée Avec toutes ces nouvelles options, tu seras hyper fatigué… mais très bien embarqué sur la voie express de la SO-CIA-LIS-A-TION. Bienvenue parmi nous, les humains !

R – Voeïpa ! voeïpa !

Les textes présentés ci-dessus sont sous la responsabilité de leur auteur. Ils sont quasiment le fruit brut qui a été cueilli en fin de séance... sans filet !
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