SAMEDI 16 Novembre 2019
de 14h00 à 19h00

dans le cadre du cycle
"Vives incitations - année 2"

Animation : Régis MOULU

Thème : Verser convulsivement dans l'excentricité

Être original (ou se comporter de façon originale) prend une forme intéressante dès lors qu'il sert une cause et/ou crée du sens. Il y a là comme un regain d'intérêt et une source de curiosité qui ravivent les désirs. Le but va donc être, au cours de cette nouvelle séance survoltée, de manier avec excès ce paramètre créatif et déroutant au gré d'une inspiration de bon aloi.


Remarque : au-delà de la contrainte formelle (thème), le sujet sivant a été énoncé en début de séance : rédiger un texte comportant au moins trois ruptures (à prendre comme vous voulez, soyons fous !). Par ailleurs, votre texte devra inclure les 10 mots suivants : angélique, béquille, brioche, éléphantesque, fichtrement, flasque, friche, oursin, pulluler, tiroir.
Pour stimuler et renforcer l'écriture et les idées de chacun, un support comportant toutes les voies d'excentricités possibles sur le plan littéraire a été distribué en ouverture de session, c'est grandiose et renversant !

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Ci-après quelques textes produits durant la séance, notamment (dans l'ordre):


- "L'estrade est étroite mais le public nombreux" de Janine BURGAT

- "Angélique à l’hôpital ou les couleurs du paradis" de Nadine CHEVALLIER

- "Marie a dix ans" de Lucette LUCE

- "L'homme de la situation" de Marie-Odile GUIGNON

- "Nos défauts nous rendant davantage attachants" de Régis MOULU



"L'estrade est étroite mais le public nombreux" de Janine BURGAT


L'estrade est étroite mais le public nombreux.
Moi je suis là, plantée, face à tous.
Mon orgueil est au plus haut. Non, je ne suis pas là par hasard. Merci à tous pour ces encouragements délirants.
Oui, je suis fière, très fière. Et dans l'attente de cette médaille que tous pensent bien méritée, je glousse en silence. Mon visage reste angélique devant les compliments et les acclamations.
- Il est où ? Il est où ? demande le premier rang.
- Amenez-le, amenez-le ! scande la salle.
Alors, fichtrement solennelle, je me baisse et ouvre le tiroir du petit meuble à mes pieds.
Et je le sors, et je le brandis à bout de bras, mon gant bien visible pour qu'il soit confortable et ne se fracasse pas. Il me faut bien le tenir.

La foule hurle.
L'oursin à béquille lève son petit moignon lumineux. Ce petit handicapé tourne alors tous ses piquants vers moi et en signe de remerciement, tous les autres piquants s'inclinent.
Quel bonheur !
Un roulement rappelant le bruit d'une vague entreprenante s'élève.
Des coulisses s'avance un pêcheur à la brioche éléphantesque, un torchon blanc sur le bras, les bottes encore humides. Il apporte la récompense.
Un camembert d'or ! Le prix le plus convoité de tous les amoureux des oursins.

- Au nom de chacun d'entre nous, cette médaille récompense vos soins généreux envers un jeune oursin bien de chez nous. De cette friche où pullulent tant de crustacés vauriens, vous avez su reconnaître le plus handicapé de tous, l'oursin à béquille.

Le bruit de la foule couvre ses paroles. De sa grosse main, il impose le silence.
- On sait tous, reprend-il, qu'Handicap International a financé cette fameuse béquille lumineuse.
Alors oui, vous tous les oursins un peu flasques qui croupissez dans les eaux saumâtres que notre monde vous accorde aujourd'hui, reprenez espoir, la béquille salvatrice existe !

Tous les oursins présents trépignent sur leurs piquants.

J'ai le triomphe modeste, moi, mais je me penche ave délice pour que le pêcheur gargantuesque me passe le cordon autour du cou. Comme aux Jeux Olympiques de naguère.
Camembert d'or (même si la boite est vide) pour la première dame à concevoir une béquille lumineuse pour oursin handicapé. On n'arrête pas le progrès.

Le handicap, ça me connait. Dans une autre vie bien remplie, ils étaient tous, toute ma vie.
Reconnue dans mon métier pour ma présence, ma compassion, ma patience.
C'est au service d'un oursin infirme que je conclue une carrière sanitaire et sociale. C'est écrit sur mon diplôme. Oui il date de Mathusalem mais tout de même, ça en jette.
- Tu fais quoi, toi, comme bac ?
- Sanitaire et Social.- La vache !
- Non l'oursin.
- Comment tu peux fondre devant ces bestioles infernales ? Elles piquent, elles sont inertes, elles voient mal. Et toi tu leur installes des béquilles lumineuses quand
un piquant s'est cassé ? Tu remplis l'océan des misères avec une petite cuillère !
Tu vas les chercher où tes petits protégés ? Tu les ramasses comment ? C'est quelle marque tes gants ? Avant de les boulotter, car bien entendu, tu en boulottes un ou deux au passage, avoue.
- Je n'aime pas les fruits de mer. Je m'en occupe c'est tout. J'améliore leur quotidien. Et si nombre d'entre eux accèdent à des béquilles lumineuses, les océans en seront transformés. Et je rejoins le mouvement écolo. Poil au dos. Le niveau des océans monte ? Et si les oursins ne comptent plus leurs béquilles lumineuses alors quand le courant électrique terrestre s'éteindra, les océans nous éclaireront. Poil au croupion.

- Change pas de genre animal. Au moins les poules donnent des œufs. Les oursins ne donnent rien, à part des piqures urticantes.
- Rapaces que vous êtes. A moi, ils donnent l'illusion que je fais le Bien. Du Bien à quelques vivants de cette planète moribonde.

Eh ! Vous tous les oursins, avec ou sans béquille, que répondez-vous à ces accusations grossières que vous ne servez à rien ? Que vous ne donnez rien ?

Là, je vois que je suis allée trop loin. Une montagne monstrueuse arrive sur nous. Elle se déplace en masse compacte. Avec ou sans béquille. Des milliers de piquants imbriqués les uns dans les autres, roulant sur eux même. Une montagne redoutable, hérissée et brune. Elle grouille. Seul l'oursin n'est rien, mais amalgamé, c'est un formidable écueil, imprenable même avec des gants.

Une main de plastique me présente trois oursins agités de tremblements.
- Sentez moi ça; dit Monsieur Salé, mon poissonnier. De l'iode, du frais, arrivés de ce matin. Direct.
Habiter au bord de mer n'a que des avantages, je le dis tous les jours.

Les petits oursins me regardent.

Quand l'eau recouvrira ton étal, tu rigoleras moins, Monsieur le Poissonnier.

Voilà ce que j'ai pensé, Monsieur le Commissaire et il a pris mon poing dans la gueule.
Du coup, j'ai ramassé les petites bêtes qui étaient tombées et on est allé à la plage que je les remette au plus vite dans les vagues.
C'est là que j'ai vu le plus petit. Il avait cassé un piquant. L'idée m'est venue. Une béquille.

- Et la prochaine fois vous leur construirez un fauteuil roulant peut être ?

- Alors ça, Monsieur le Commissaire, c'est une bonne idée, une sacrée bonne idée, merci...



"Angélique à l’hôpital ou les couleurs du paradis" de Nadine CHEVALLIER


Sur la table de nuit blanche, la tisane d’angélique refroidit dans un bol éléphantesque.
L’homme grand et maigre aux cheveux blancs encore abondants, appuyé sur une béquille, boitille jusqu’au lit blanc. Son pied droit plâtré frotte le carrelage noir à chacun de ses pas, A son pied gauche une chaussette noire trouée laisse passer un orteil pâle et volumineux.
Trois coups à la porte qui s’ouvre aussitôt. Entre une imposante infirmière noire en tenue blanche. Elle gronde :
« - Que faites-vous debout, Monsieur ? Allez, recouchez-vous ! Voici vos pilules pour dormir.
- Pourquoi vouloir que je dorme ? questionne l’homme d’une voix blanche.
- Vous avez besoin de repos a dit le médecin. Tenez, prenez-les avec la tisane, elle est froide. »
L’homme sagement, avale sa tisane d’angélique et les trois pilules blanches devant l’infirmière noire. Il lit un prénom sur la blouse, Angélique.
Eh bien, pense-t-il, me voilà peut-être dans un paradis en noir et blanc.
Car pour tout vous dire, cet homme là, au pied plâtré, sort de l’enfer. Oui, oui, figurez-vous qu’il a failli laisser sa peau flasque et blême et sa brioche naissante sous les coups de pioche d’un assassin, là-bas, dans la friche du quartier sud. Vous savez là où on devait construire la Maison des Associations, ce vieux projet qui retourne régulièrement dans les tiroirs de la Mairie.
L’homme avait décidé de l’en faire sortir.
Le pourra-t-il maintenant qu’il s’endort dans ce lit blanc, un goût âcre dans la bouche. Le bandage qui lui ceint le front s’auréole de rouge. Il respire à petits coups, il a des côtes cassées. Son visage pâle piqué d’écarlate, se convulse, ses mains se crispent. Elles sont griffées, comme lacérées par des oursins. Il est fichtrement amoché.
L’assassin l’a raté de peu, dérangé dans son forfait par l’arrivée inopinée de la montgolfière de l’AMTA*(voir note en bas de page).
Mal dirigée par un aérostier débutant, la montgolfière était descendue trop bas et avait dû se poser en catastrophe dans la friche. L’éléphantesque sphère s’était couchée de biais, enfouissant notre homme dans ses plis flasques et lourds tandis que l’assassin s’enfuyait à toutes jambes et disparaissait. Ce n’est que deux heures plus tard, lorsqu’enfin on réussit à dégager, plier et replier le monstre qu’on trouva l’homme gisant inconscient.
Des fourmis pullulaient -c’est quoi ce mot « pu-llu-ler » ? c’est un mot fichtrement moche, je vous le dis comme je le pense. Brr… rien qu’à imaginer les fourmis « pullulant » sur mon héros, j’ai envie de changer l’histoire. Non ? Bon, alors tant pis pour lui-

Le voilà donc couvert de fourmis qui ont commencé à lui mordiller le corps partout où elles ont pu passer. Le pauvre !
SAMU, urgences, radios, salle d’op plus tard, nous le retrouvons endormi dans son petit lit blanc, rêvant… à quoi ? Laissons-le se reposer, il en a besoin, a dit le docteur.
Mais que se passe-t-il ?
Agitation dans le couloir, une course, des cris …
« Monsieur, Monsieur, où allez-vous ? Retournez dans votre chambre ! Monsieur ! »
Ouvrons la porte pour savoir ce qui se passe, voulez-vous ?

Un homme grand et maigre, aux cheveux blancs encore abondants est aux prises avec Angélique et sa collègue . Elles le tiennent par les bras.
« Monsieur, vous ne pouvez pas partir, retournez dans votre chambre »
Les protestations de l’homme sont inaudibles dans ce déluge d’exhortations. Il est entraîné par les deux puissantes soignantes jusqu’à…
On dirait qu’ils viennent par ici …
Refermons vite la porte …

* AMTA : Association de Militants pour des Transports Alternatifs. L’association organisait ce jour là un baptême pour tous.



"Marie a dix ans" de Lucette LUCE

Marie aime ce moment de la nuit, moment où elle est seule face à elle-même.  Moment où elle s’entend respirer, elle entend même respirer les murs. Et oui ! Vous avez bien lu ! elle entend respirer les murs. D'ailleurs, c’est l’heure d’entrer en contact avec son ami Alfred, un mur vieux de 100 ans. Un mur qui abrite d’autres amis.

Qui se douterait de cette petite fille à l’allure angélique, cacherait une vie nocturne à ses parents ?
Marie, après avoir embrassé ses parents, ferme les yeux comme à son habitude pour inciter ses parents à quitter sa chambre ;
Plus un bruit. Scolalie !scolalie ! appelle-t-elle. Et voilà le mur qui se déforme. Une petite lumière qui grandit prend la forme d’un personnage.
Bonjour scolalie dit marie.
Bonjour marie dit scolalie
Scolalie mesure environ 10 cm de haut. Scolalie est heureux de prendre vie. Scolalie se rapproche de Marie. Le voilà qui lui saute sur le visage, lui tire les oreilles, lui souffle dans le nez. La petite fille rit aux éclats.  Oh ! J’attendais ce moment avec impatience dit Marie.

BOUOUM ! Un grand bruit réveille la maisonnée. Les parents de marie allument la lumière et viennent voir s’il n’est rien arrivé à leur petite fille. Scolalie eut tout juste le temps de retourner dans le mur et Marie sous les couvertures les yeux fermés.
Rassurés, les parents se dirigent vers la fenêtre pour voir ce qui se passe. Une forme à l’allure éléphantesque a atterri sur le toit de la maison et abima une partie du mur d’entrée. Le père se dirige vers le garage pour voir s’il ne peut pas trouver une bâche pour protéger le mur en attendant le lendemain. Il est tard, on verra demain pour appeler l’assurance dit le père. Pour se donner du courage à deux mains, Justine  la mère de marie attrape la béquille du grand-père et accompagne jules le père muni de la caisse à outils et d’une bâche, pour examiner l’étendu des dégâts.

A leur grande surprise, ils voient une énorme forme flasque fluorescente qui a l’air effrayée de voir Justine et Jules. Justine se cachant derrière Jules a une peur bleue. Jules qui veut montrer qu’il est le maitre de la maison, qui assure la sécurité de sa famille s’avance vers cette forme. Plus Jules s’approche, plus la forme baisse de volume et perd de sa couleur, jusqu’ a atteindre un forme plate au sol.

Pendant ce temps-là, Marie reprend la conversation avec Scolalie.
Scolalie sais-tu ce qui se passe demanda marie ?
C’est chouchou qui arrive tout droit des Etoiles dit Scolalie. IL s’est trompé de forme et de cible. Il est venu au rendez-vous de la pleine lune.
Le rendez vous de la pleine lune répéta Marie, l’air tout étonnée !
Effectivement, la lune, belle, pleine, brillante  illumine le ciel

Oui il va bientôt être minuit et tu vas assister à un spectacle inoubliable, car maintenant que tu as 10 ans, tu dois passer un rituel. Un rituel pour être acceptée dans notre monde.
En quoi consiste ce rituel ? demanda Marie
Tu verras répond Scolalie

Scolalie se met à siffler un air très doux faisant penser au vent qui passe sur les feuilles des arbres. D’un coup toute la chambre de Marie s’anime. Du tiroir de son bureau sort l’oursin desséché que Marie ramassa sur la plage l’été dernier. Voilà que cet oursin qui avait pris sa place dans le tiroir depuis tout ce temps, prend vie.  Ses épines s’animent. Il devient fluorescent.

De la porte de l’armoire se matérialise une forme triangulaire de couleur bleue s’approche du lit, se place à la tête du lit. L’oursin après avoir change de couleur plusieurs fois, s’arrête au violet et se pose au pied du lit.
Du coffre a jeux s’évade une petite luciole. Une luciole verte avec des ailes dorées, vient se poser à la droite de Marie.

Justine et Jules sont toujours dehors se demandant ce qui se passe. Entre temps le voisin qui n’a pas l’habitude de voir Justine et Jules dehors à cette heure tardive, vient à leur rencontre pour leur demander s’ils n’ont pas besoin d’aide.
Justine et Jules  racontent ce qu’ils ont entendu, un gros BOUOUM, ce qu’ils ont vu, la forme éléphantesque qui diminue jusqu’ à devenir une petite flaque. Le voisin, les cheveux en friche, les écoute sagement mais ne croit pas un seul mot de ce qu’ils peuvent raconter ;
C’est fichtrement curieux, votre histoire là ! vous n’auriez pas bu un petit coup de trop si je peux me permettre ?s’exprima le voisin

Venez voir répondit jules, vous verrez que nous ne fabulons pas.
La petite flaque profitant de la discussion s’éclipsa. Elle s’est repérée par la vibration qu’a émis Scolalie, le sifflement pour trouver la chambre de Marie. La petite flaque retrouva sa couleur jaune or et prend place sur la poitrine de Marie. Elle prend la forme d’un soleil. Un soleil intense qui réchauffe le cœur de Marie.
Avec toute cette agitation, on a oublié le serpentin. Le serpentin qui est arrivé en même temps que la grosse forme, mais a eu la présence d’esprit de se cacher. Le serpentin de couleur orange, prend sa place sur la gauche de marie.

Les 12 coups de minuit sonnent et d’un coup d’un seul, le corps de la petite marie se met à briller, s’illuminer de mille feux. Un filet de lumière sort de la tête de Marie passe par le triangle. Soudain Marie se retrouve projetée dans un autre monde, laissant son corps su le lit comme si elle dormait.

Justine et Jules font signe au voisin. Venez ! la forme est ci. A leur grande stupeur, la flaque a disparue. Venez voir notre maison comment elle est abimée, la preuve j’ai pris une bâche pour protéger la maison en attendant demain matin.

Dans le même instant les regards se portent sur la maison. Il n’y a pas une égratignure.
Je vous assure Mr Donald dit Jules il y a eu une grosse forme qui est tombée sur notre maison.
Ecoutez Mr Ferrand, je ne voudrais pas vous manquer de respect, mais je ne vois rien. Bientôt vous allez me dire que les extra-terrestres sont venus pulluler la terre !
Euh ! c’est justement ce que j’allais vous dire. J’ai entendu à la télévision que les extra- terrestres ont été aperçus dans la région dit Jules
Vous y croyez vous aux extra-terrestres ? demanda Mr Donald
Oui j’y crois répondit Jules. Lorsque je vais à la montagne, je vois parfois des formes au niveau des nuages. Parfois, de ces nuages descendent des formes humaines. Il m’est arrivé de voir l un d’eux qui m’a fait un signe de la main. Et vous ? vous y croyez ? Oh je ne crois pas en ces balivernes ! ça, ce sont des histoires de conte de fée. Ne seriez-vous pas somnambules par hasard ?
Justine et Jules se sentant un peu ridicule ne sachant pas quoi dire, remercièrent leur voisin de s’être préoccupé d’eux et le saluèrent. Au revoir Mr Donald dirent Justine et Jules.
Au revoir m’ssieu dame  répondit Me Donald.

Justine, tu as bien vu comme moi la grosse forme gigantesque fluorescente ?
Oui chéri, je l’ai vu je t’assure répondit Justine
Tu as bien vu le trou qu’il y avait sur le coté du mur près de l’entrée ? continua Jules ?
Oui chéri répondit Justine. C’est à n’y rien comprendre. Allons-nous recoucher. Peut-être que nous avons rêvé. Peut-être que nous sommes somnambules, que nous sommes dans un grand rêve réalité.
En passant, ils jettent un coup d’œil dans la chambre de Marie ? Rien n’a bougé. Ouf ! elle ne s’est douté de rien la petite ! murmura Justine.

Marie quant à elle se trouve dans un espace lumineux, avec des couleurs chatoyantes. Elle aperçoit également d’autres enfants de son école, des voisins, des voisines qui eux aussi ont eu leur 10 ans. Marie est heureuse. Elle se sent légère. oh ! elle se rend compte qu’elle peut voler. Elle se rend également compte qu’elle se retrouve là où elle veut uniquement par le pouvoir de la pensée. Elle peut aussi faire venir à elle des objets par la pensée. Marie matérialise sa poupée Barbie, son ours fétiche.
Oh c’est rigolo se dit –elle. Ah j’ai faim chuchote-elle. Elle se concentre à nouveau et une belle brioche dorée vient à elle, que marie savoure.

Soudain une cloche retentit au loin. Tous les enfants sont rassemblés autour d’une place. Marie suit les autres enfants.
Sur cette place, il y a un être vêtu de blanc, d’un blanc lumineux qui s’adresse aux enfants de façon très douce. Il s’adresse aux enfants dans ces termes :
Chers enfants de la terre. Soyez les bienvenus. Vous arrivez à un âge où il est temps de savoir qui vous êtes, ce que vous êtes venus faire sur cette terre. Vous êtes dans ce monde, mais vous n’êtes pas de ce monde. Vous venez des étoiles. Vous avez un rôle à jouer dans ce monde. Nous comptons sur vous. Dorénavant chaque soir à minuit, nous nous retrouverons ici à la même place pour apprendre. Réapprendre qui vous êtes. Si vous évoluez bien, vous aurez un autre instructeur. Il suffit de vous installer avec les objets placés autour de vous, prononcer les mots magique et vous arrivez ici instantanément. Lorsque dans la journée, vous avez des difficultés avec vos camarades ou avec votre entourage, il suffira de fermer les yeux et de penser à cet instant, immédiatement vous retrouvez la paix dans votre cœur. Les objets qui vous ont permis de passer la barrière du temps seront toujours là avec vous. Ils vous rappelleront cet instant.

Le monde terrestre est rempli de leurres et lourdeurs. On oublie vite ce pourquoi on est là ? Ne laissez jamais quiconque s’emparer de vos objets précieux. Ils vous serviront toutes les nuits à nous rejoindre. Vous êtes les bâtisseurs de demain.
Que la paix soit avec  vous.

Tout à coup, une grande lumière descendit du ciel, recouvrit toute l’assemblée des enfants. L’être en blanc bénit les enfants. Marie et les autres ont le sourire aux lèvres. Ils ressentent une paix indescriptible et une joie immense. Tous ont l’air lumineux.

Driiiiiing ! driiiiiing ! c’est le réveil de Marie. Il est 7 h, l’heure de se lever, se préparer pour aller  à l’école.
Justine vient à la rencontre de Marie dans la cuisine.
Bonjour maman chérie dit Marie en faisant un gros câlin à sa mère.
Bonjour mon amour répondit Justine. As-tu bien dormi ma chérie ?
Oui maman. J’ai fait un très beau rêve
Ah tant mieux ma chérie. Ton père et moi par contre avons fait un terrible cauchemar.
Ah ! dit la petite fille en souriant.
Pourquoi souris-tu Marie ? demanda Justine
Oh !  pour rien dit-elle d’un air espiègle

Marie prend son petit déjeuner. Jules arrive à son tour pour embrasser Marie avant de partir au travail. Jules est déjà prêt, son manteau sur le dos et son a la main. Il a les traits tirés témoignant d’une nuit agitée. Justine embrassa tendrement son mari en lui disant c’est normal que nous ayons mal dormi cette nuit. C’était la nuit de la pleine lune. Il n’est pas rare que les gens dorment mal dit-elle.
C’est gentil de me consoler répondit jules. Bonne journée mon amour !
Bonne journée chéri dit Justine
Dépêche toit Marie il est temps d’aller sous la douche si tu ne veux pas arriver en retard à l’école.
Marie finit la dernière gorgée de lait et file sous la douche

Marie est toute guillerette, chantonne, au grand étonnement de la maman. Marie s’habille. . Justine accompagne sa fille à l’école comme à son habitude. Marie sautille sur le trottoir, son cartable sur le dos, rencontre en chemin d’autres enfants tout aussi guillerets. Marie se dit « oh on aura beaucoup de choses à se raconter » !

 

 

"L'homme de la situation" de Marie-Odile GUIGNON



Depuis la nuit de son existence, échapper à l'espèce humaine abreuvait ses aspirations. Il courait à perdre haleine comme les loups. Il se contorsionnait comme les serpents. Il scrutait la nuit comme les oiseaux nocturnes. Etc., etc., etc.
Prénommé Ange, bel homme séduisant, éduqué raisonnablement, niveau d'études supérieures à la moyenne de sa génération, intellectuel et intuitif, il gérait avec perspicacité l'entreprise familiale générationnelle : une fabrique de béquilles artisanales.
Sans être affecté dans ses frondaisons, une vaste forêt fichtrement belle fournissait la matière première nécessaire au travail des ouvriers spécialisés dans le travail du bois. Ange connaissait les moindres replis de ses friches. C'était une séduisante forêt. Hélas, jamais il ne réussit à s'égarer dans ses flancs... Dommage !
Ses désirs intenses, surdimensionnés, déclenchèrent un jour la réalisation de ses rêves angéliques. Un faux-pas, une entorse l’entraînèrent à la poursuite d'une gracieuse Sylphide. Le vertige s'empara de ses sens, chacal aboyant à la Lune, le cœur déchiré de souffrance, il sombra mollement...
Et voilà présentement :
Il gît sur un lit de fougères accueillantes, le corps flasque endolori. Coma profond dans les abysses de son subconscient. Illusion d'une plage de sable fin ornée d'algues couleur de jade où des oursins se trémoussent : ballet classique sur pointes.
Perdant pied, Ange s'enfonce nageant dans une mouvance liquide, obscure, accompagné d'un mystérieux MIRAGE. Serait-il « Poissons » ? Impossible ! Il est du signe du « Lion » ! Il constate : l'horoscope perd de sa fiabilité ! Jusqu'à ce jour, chaque matin à son réveil il le consultait sur son i-phone. De plus, régulièrement il sortait de son tiroir son jeu de tarot pour effectuer un tirage soit d'une carte pour obtenir une réponse, soit de trois cartes pour vérifier passé-présent-avenir...L'urgence exige qu'il avertisse le Zodiaque.
Ange, librement explore son inconscient. Les difficultés pullulent à cause de l'obscurité stagnante qui gène sa progression. Si seulement une étoile brillante non éblouissante choisissait de venir l'éclairer. Après le mirage, pourquoi pas le MIRACLE. L'émergence pousse partout...

Si une dose de levure trop abondante n'en finit pas d'augmenter une brioche de manière éléphantesque, avant sa cuisson, il s'ensuivra que cette surdose provoquera une dispersion d'éclats surnaturels et sulfureux. Et c'est ainsi que surviendront les RÉVÉLATIONS.

 


"Nos défauts nous rendant davantage attachants" de Régis MOULU, animateur de l'atelier

 

Robert vivait un rêve éveillé
devant la vitre réfléchissante de son micro-onde,

celui de pouvoir jouer
à être pleinement son sosie,
selon l'idée folle que :
« plus on est sa propre chimère préférée,
et moins l'ange qui nous aime
peut ne plus nous aimer,
nos défauts nous rendant
davantage attachants.

C'était bien cela que pensait précisément Robert
qui, dans l'intimité,
se faisait appeler Iphigénie,
alors même qu'il aurait eu un faible pour Chantal.

Étendu sur la porte démontée de sa cuisine
qui lui servait de lit
puisqu'apposée sur deux packs de bières
qui faisaient office de tréteaux,
il se grattait excessivement et lascivement
sa brioche rosée
afin, à la longue,
d'en peler une partie
… tant sous le derme
surgit toujours, en effet,
une partie du monstre qu'on n'a jamais osé être,
souvent sous les traits d'un animal
qui se prend pour un humain
exaspéré de n'avoir été que trop longtemps
un symbole.

Clac fait le verre en tombant sur le lino.

Et elle-lui de déjà vagabonder
aux frontières des pensées-limites,
en territoire vierge :
la première d'entre elles fut :
« qui s'incise se crée un tiroir
d'où sortira une nouveauté
relevée à la vraie sauce émotionnelle !! »

Il neige : le persan gratte son code
sur le meneau
afin que la fenêtre s'ouvre.
Pas de réaction…

On se croit tous éléphantesque,
privilège de la prime jeunesse,
et voilà qu'en phase d'introspection,
on perçoit que son âme
ne saurait surclasser un oursin !

Iphibert qui se prenait
de plus en plus pour Rogénie
eut l'impression, à cet instant,
que logeait dans son ventre
un volcan prêt à cracher.
C'est avec les mains moites
qu'il voulut alors s'emparer
d'une flasque et d'un verre.
Ne trouvant que la première,
il mit un pied hors de sa porte
et trouva subitement le second
qui se planta fichtrement dans son pied.

Le lino s'enrichit d'un nouveau motif,
évolutif.

Quelle poisse, quelle purge !

La vue de son encre bio
marqua aussi son cerveau.
Son abondance sans cesse renouvelée
la transporta dans un délire de béquille,
dans des rêveries heureuses
de vie au ralenti,
comme sur la Lune,
là où la poésie
se sert facilement de ses grands bras…

« Début de la coupure d'eau » se dit-il.
En effet, dans la rue, plus d'ouvriers
qu'on ne peut en compter.

Bizarrement, il-elle ne souffrait pas.
Se remboîter ses yeux de nouveau-né
permet en effet à quiconque
de privilégier la découverte
en taisant tous ses marasmes.
« Orbites nouveaux, pensée neuve » !
Il vida la flasque sur son front.
Ambiance cognac.

Un brouillard de sensations
le désincarna un instant.
Était-ce le siccatif alcool sur les plaies à vif
de son ventre et de son pied
ou son abandon
aux lois polyglottes de l'imagination
qui prévalait ? toujours est-il
qu'il était certain à présent
d'avoir une chair de lézard.

C'était comme si ses muscles étaient plus courts,
à moins qu'il ait désormais
une lymphe plus rapide,
il conçut aisément
que son cœur officiait
comme un tourniquet d'arrosage.
Tout un gazon d'espoir
verdissait en lui :
son sosie existait bien,
quand bien même fut-il
un peu trop reptilien.

Le chat est mort, étrange prestation.

Comment gérer cette tardive vie cachée ?
Car, quand en soi, tout change,
hors de soi tout semble plus âpre,
plus dur, plus pierreux.

Des réajustements s'avéraient nécessaires.
Mille et deux actions.
L'exaltation s'empara de lui
comme du gingembre convertit
une assiette de crevettes.
« Ici et maintenant, pour moi,
tout est friche » se convint-il,
« laissons dès lors les projets pulluler ! »
se cornaqua-t-il, un brin angélique.

De fantasme en hallucination,
d'enchantements en promesses,
de porosités en lévitations,
Iphibert se dédoubla
au fur et à mesure qu'il détachait
les pensées de son cerveau
en se les formulant à voix haute.

Acteur exultant, animal éructant,
ses pattes s'agitaient de plus en plus
de sorte que l'initiale tache de sang au sol
était devenue une constellation complexe, unique, infinie
de par l'extrême finesse de ses détails.

Sauf que cette voie lactée parallèle
était bien rousse,
à l'instar d'un antique décalque
que foulait allégrement un gecko géant !

Un rythme endiablé
s'empara de ses membres.
Des sons imprévisibles
sortirent de sa bouche…
ainsi qu'une salive de criminel
que sa langue avait
jusqu'à maintenant choyée
et maintenue au chaud.

Cette vigueur recouvrée
assécha l'air.
La cuisine était devenue plus petite
et plus grande à la fois,
vraisemblablement plus haute.

Le téléphone sonna. Vous pensez bien qu'on s'en cogne.

Peut-être même que les pupilles de Rogénie
s'étaient verticalement allongées.
On aurait dit deux trous de serrure
par lesquels son âme pourrait
être au mieux approchée,

surtout qu'il est désormais prouvé
qu'au fond de l'œil de chacun d'entre nous
logent nos parents qui ont eu notre âge
au moment précis où l'on a cet âge,
à moins, bien sûr, qu'ils aient déménagé
et laissé la place à de nouveaux arrivants
de plus en plus dégénérés,
c'est-à-dire d'une extravagance
qui pousse à l'ordinaire délinquance.

Les textes présentés ci-dessus sont sous la responsabilité de leur auteur. Ils sont quasiment le fruit brut qui a été cueilli en fin de séance... sans filet !
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