SAMEDI 11 JUIN 2011
de 14h00 à 19h00

dans le cadre du cycle
"Le monologue du plaisantin"

Animation : Régis MOULU

Comédien présent :
Fabrice CARLIER

Thème :

Outrances et irrévé-
rences


Au cours de cette nouvelle séance, il a été question d'investir les registres peu recommandables de la ruse, de la tromperie ou du mensonge éhonté !

Dans un tel contexte, le plaisir de l'auditeur-spectateur proviendra du stratagème, du machiavélisme et de l'inventivité du moyen utilisé pour arriver à ses fins. Mais à quelles fins ? Hé, hé, hé...

Remarque : au-delà de la contrainte formelle (thème), le sujet suivant a été proposé en début de séance : écrire un monologue destiné à extorquer à son interlocuteur, de façon ignoble, quelque chose auquel il tient.
Pour stimuler et renforcer l'écriture et les idées de chacun, un support a été distribué. Il contenait notamment 15 conseils pour savoir mentir vrai... ça peut toujours servir, non ?

 

 

 

 

 

 

 

 

 


 

Ci-après quelques textes produits durant la séance, notamment (dans l'ordre):

- "Découverte de la forêt" de Nadine CHEVALLIER



Fabrice CARLIER incarnant un texte (coll. R. Moulu)

 

"Incroyable mais vrai" d'Angeline LAUNAY

Tu sais que j'étais persuadé qu'on s'connaissait… Si ! Si ! Voyons, où aurais-je pu te rencontrer ? C'est pas les occasions qui manquent… A la pelle, les occasions ! Ou alors tu m'rappelles quelqu'un… Ouais, t'es plutôt mon type de nana. Sorry, je devrais pas dire ça, enfin pas encore… C'est vrai que t'as quelque chose… Oh la, j'me lance… Je suis sûr qu'on a des tas de choses à s'dire… Tiens, c'est quoi ton prénom ? Moi, c'est Zac, diminutif de Zacharie. Ouais, mes parents, leur livre de chevet, c'est la Bible ; moi, c'est plutôt San Antonio. Non, non, te bile pas, je sais aussi être doux comme un agneau… un vrai toutou-touche-à-tout… Fais pas attention…
J'ai pas compris ton p'tit nom… " Violette "… Ah, timide comme une violette… C'est bien ma veine… je voulais dire ma " verveine "… C'est une blague… Si j'ai plus d'un tour dans mon sac, c'est pour la frime… pour noyer le poisson… Qu'est-ce qu'il fait le poisson, hein ? - Rien du tout ! Tout ou rien ! C'est du pareil au même, pas vrai ? - " Violette "… Ah, si j'm'attendais à ça… C'est la première fois que j'rencontre une petite Violette… Super ça, c'est super… C'est romanesque… Y'a pas… Cueillir la fleur en sa plus simple nouveauté… Comment j'peux sortir des trucs pareils ! Non, mais c'est qu'tu m'inspires, tu sais… Je raconte pas que des bobards, tu peux m'croire… J'ai pas l'habitude d'inventer des salades… Pourquoi je f'rais ça d'abord… J'ai aucun intérêt à saboter mes chances !
Enfin, tu vas penser que j'te fais du gringue… C'est pas ça du tout… On passe juste un moment… J'aimerais que ce slow ne finisse jamais… Regarde, on est embarqués dans un sacré nanar, euh, un sacré scénar… Tu sens comme ça tangue, comme ça chaloupe… une chaloupe à la mer ! T'inquiète, j'ai le pied marin. Avec moi, tu crains rien. Bon, j'en rajoute un peu mais tout ça n'est pas si loin de la vérité… la bouche de la vérité - je devrais dire " les lèvres de la volupté " - mais ça pourrait te choquer… Loin de moi cette intention ! Avec moi, tu crains rien… Je l'ai déjà dit d'ailleurs.
Je suis comme je suis, c'est juste à prendre ou à laisser… J'suis pas un mec compliqué… J'aime… la détente à tout venant. J'aime… conclure quand il en est encore temps. On n'est pas obligé de tout prendre au pied d'la lettre… Il y a loin de la pensée à l'acte… C'est sûr… Et toi, tu s'rais pas du genre " qui ne dit mot consent "… Mine de rien, si je n'exprime pas mon désir, qui le fera à ma place ? - Toi, ma timide Violette ? - Je sais bien que non. - Excuse ma familiarité… mais ton parfum pénètre ma narine, mes deux narines même… Je suis transplanté… Tu ne sais à quel point je me sens transporté… ailleurs… Tiens, si on allait ailleurs…
Qu'est-ce que tu en penses ? C'est trop bruyant ici… Il y a trop de monde… On pourrait sortir respirer la nuit… Ah, j'aime la nuit… marcher le long des quais… Avec toi, ça t'aurait une de ces allures ! Je te tiendrais par la taille… "et plus si affinités"... Je rigole… Peut-être, tu vas penser que j'ai des intentions cachées… Jamais de la vie ! Je fais tout par devant, rien par derrière… Je peux te le prouver !... Je vois que tu flanches - pardon - que tu te laisses convaincre. A la bonne heure ! D'ailleurs, c'est minuit, tout est permis ! Je plaisante…
Qu'est-ce que c'est réjouissant, ce p'tit vent qui secoue les voiles ! Embarquement immédiat… Navigation à vue… On tente… On expérimente… "Ah, Violette, que vous avez de grands yeux…" - J'avais pas remarqué tellement il faisait sombre dans cette boîte… On a bien fait de sortir… Dehors, c'est le grand large, la liberté ! On fait c'qu'on veut. On va où on veut. J'habite pas très loin d'ailleurs… Mais qu'est-ce que tu vas penser ! C'est seulement une remarque, une constatation… Ne vas pas imaginer l'inimaginable… Je n'me permettrais pas… C'est juste au cas où tu aurais une petite soif, une petite faim, une petite fatigue… " en tout bien tout honneur "…
Je suis un chevalier des sables, un oiseau inoffensif qui n'attend que l'occasion d'être re-cueilli… Tiens, un genou en terre… c'est comme ça qu'on faisait avant… Je suis prêt à tout, la main sur la poitrine ! Tu ris ? Mais il n'y a pas de quoi, je t'assure… J'ai peut-être l'air un peu idiot… un peu seulement… Le jeu, la chasse, loin de moi ces foutaises ! L'homme est ce qu'il veut bien être… La femme s'en contente ou pas - je veux dire - la femme est contente ou pas… Ma Violette, que dirais-tu de pousser dans mon jardin intérieur… Ce serait dommage que le doute s'installât entre nous… Voilà que je deviens pompeux - pimpon, pimpon - J'arrive presque à lire dans ton regard… Dis-moi si j'me trompe : tu sais et tu ne sais pas… tu ne sais pas mais tu sais… Seule la confiance peut nous rapprocher, c'est pas ton avis ?... Déjà tu pourrais voir chez moi… quel décor, quelle ambiance… Tu pourrais comprendre quelle sorte d'homme je suis… Ce serait un bon moyen de faire connaissance…Je te laisse juge. La décision, c'est toi qui la prends. Je n'peux pas mieux te dire… Je n'cherche pas à t'influencer. Qu'en penses-tu ?... Allons-nous monter ensemble… l'escalier… C'est pas haut, je n'suis qu'au deuxième étage… Un étage, tu me précèdes, un étage je te précède… C'est pas équitable ça ?
Après… la découverte… l'aventure… Chez moi, c'est pas tout à fait la jungle ! C'est plutôt civilisé, tu verras… Un bar, des fauteuils Club, des dessins au mur que j'ai réalisés moi-même… Pas de quoi effaroucher un chaton ! Bon, il y a aussi toutes les commodités - je veux dire - si tu veux te remettre de cette promenade nocturne… Tu fais exactement comme tu l'entends… C'est pas moi qui m'opposerais à tes moindres désirs…
Tu hésites ? Qu'est-ce que je peux faire pour te mettre à l'aise… te tenir la main… te guider sur le chemin… pousser la grille d'entrée… Mais c'est toi qui passes d'abord… Non, j'ai pas de chien, pas de chat non plus. On n'sera que tous les deux, tranquilles… aucun souci à l'horizon… rien pour nous déranger… Tu rougis, tu trembles… Pourtant, c'est plus bien loin maintenant… Nous atteignons le but… C'est vrai, le mot n'est pas terrible ! Qu'est-ce que je pourrais trouver ?... Nous atteignons… nous atteignons… Tu voudrais pas m'aider un peu ?... Ouais, t'as raison, ne disons plus rien. C'est déjà incroyable comme ça…



"Découverte de la forêt" de Nadine CHEVALIER


(La jeune femme arrive, sortant un K-way d'un sac à dos, elle l'enfile et met la capuche. Elle rajuste le sac à dos et s'écrie, enjouée, pleine d'énergie)
- Bonjour, bonjour les enfants ! Je me présente, moi c'est Patience ! Bon, pour cette première randonnée découverte de la forêt, aujourd'hui, c'est pas de chance, il pleut...
(Elle regarde le ciel en faisant la grimace. Ton très enjoué, énergique)
- Mais la pluie, c'est naturel ! On n'est pas en sucre, on va pas fondre, n'est-ce pas ?
(Elle rit) - Vous avez mis des bottes ? Magnifique !
(La main en cornet autour de la bouche comme pour dire un secret. Articulant bien)
- Bon alors aujourd'hui, on va observer les indices de présence des animaux tout le long de notre parcours, d'ici...
(Elle montre le sol à ses pieds puis dessine une grande boucle sinueuse en l'air, la mine réjouie)
- à... l'endroit où le car nous attend ! ... Et y'a que moi qui sait où c'est !
(Regardant les enfants tout autour)
- Alors, dites-moi, les enfants, de quels animaux peut-on espérer trouver des traces ici ? qui peut me dire ça ?... Personne ?...
(Désignant un enfant) Toi ? non ?
(Désignant un autre enfant) Toi ? Une idée ? Non ? Allons... Tu ne vois pas ?
(Battant des bras comme un oiseau qui vole ) Un oiseau ! Bravo !... Bon les oiseaux, c'est difficile de les voir, surtout quand il pleut mais on verra sans doute des nids ... si on sait où regarder...
(Elle rajuste sa capuche, lève la tête, montre les arbres du doigt, reçoit la pluie, fait la grimace, s'essuie le visage de la main)
- Bon d'autres idées d'animaux ?... Alors ?...
(Désignant un enfant) Toi ? Pas d'idée ?
(Ton enjoué, complice) Vous dormez ce matin les amis !
(Elle met les doigt en cornes sur son front et montre un enfant d'un signe du menton) Toi ? Dis-moi... Une vache ?
(Elle rit, enlève ses mains et d'un ton doctoral, détachant les syllabes)
- Alors ! Réfléchissons ! Est-ce -que -les -va-ches -vi-vent -dans- la- fo-rêt ?...
(Montrant un enfant) Dans une ferme ! Oui !
(Surprise, regardant un autre enfant) Quoi ? S'il y en a une qui s'est échappée ? Eh bien quelle imagination !
(Accompagnant les "non" du geste) Non ! Non ! Pas de vache !...
( Elle refait les cornes) Cherchons encore... Pas d'idée ?
(Elle tire la langue et la montre du doigt) Bon, vous donnez votre langue au chat ? Je vous donne la réponse !
( Elle remet les doigts en cornes) Les chevreuils !!! On verra tout à l'heure des indices de leur présence dans la forêt... Quoi ?
(Fronçant les sourcils de surprise) Est-ce- qu'il y a des chats dans la forêt ? Pourquoi tu demandes ça ?
(Faisant les gros yeux) Pour lui donner la langue ! Mais qu'est-ce que tu m'racontes ?
(Un peu énervée, rajustant sa capuche, s'essuyant le visage) Bon, on va pas prendre racine ici... Avançons...
(Le dos au groupe, elle fait signe d'avancer, elle même reculant, elle met le pied dans un trou plein d'eau) Aïe !
(Elle sort le pied, met les deux mains en avant pour stopper le groupe) Doucement les enfants, pas de bousculade !
(Sur un pied, grimaçante, un bras levé) STOP !!! Arrêtons-nous un instant...
(Pendant la suite du monologue, elle va essayer de poser le pied à terre mais le relèvera à chaque fois avec une grimace de douleur)
- Justement, nous avons ici un indice exceptionnel de la présence d'un animal de cette forêt...
(Elle montre le trou d'eau)
(Toujours sur un pied, elle enlève son sac à dos, l'ouvre, en sort une grande image d'un animal, la lève pour la montrer à tous)
- Le connaissez-vous ? Un san...? San ? Eh la ! Réveillez-vous les amis ! Y'en a bien un qui sait parmi vous ! Ah quand même !
(Désignant un enfant, toujours sur un pied, tenant l'image au-dessus de sa tête) Oui ! Le sanglier ! Bien sûr ! (Enervée) Pourquoi tu l'as pas dit tout de suite ?
(Chiffonnant l'image détrempée et la fourrant dans son sac) T'étais trop mouillé ? Eh mon p'tit gars, on l'est tous mouillés !
(Sur un ton un peu mécanique comme répétant une leçon) La pluie, c'est naturel ! On n'est pas en sucre, on va pas fondre, n'est-ce pas ?
(Elle sort de son sac à dos une immense serviette de toilette et s'essuie le visage) Bon ! Le sanglier ! Qui peut me dire pourquoi le sanglier a fait ce trou là... où j'ai eu le malheur de mettre le pied...
(Tout bas en aparté, presque dans un sanglot) Satané bordel de merde de sanglier, j'peux plus marcher, moi...
(Tout haut) Alors ?
(Elle regarde le groupe, levant les sourcils, interrogatifs) Non, pas pour enterrer des réserves de glands...
(Ton découragé) Non, pas pour creuser un terrier...
(Ton énervé) Non ! Il mange pas la terre ! N'importe quoi !
(Se reprenant, plus calme) La réponse, les enfants, c'est qu'il creuse la terre pour manger les racines, les bulbes et surtout, surtout les vers de terre !
(Se frottant l'estomac dans un grande envolée lyrique, de plus en plus fort, levant les bras au ciel, toujours sur un pied) Le sanglier adore les vers de terre ! Quel régal les vers de terre pour un sanglier, quel délice les vers de terre pour un sanglier. C'est un nectar les vers de terre, le nec plus ultra les vers de terre, le premier prix au top chef des sangliers les vers de terre !!!
(Emportée dans son élan, elle pose le pied à terre machinalement) Aïe ! Bon, les enfants, vous êtes mouillés ?
(Les poings sur les hanches, comme très étonnée) Oui ? Très mouillés ? Mais la pluie... c'est... naturel !
(attendant que les enfants complètent la formule) On n'est pas... en sucre... on va... pas fondre. Comme vous dites !
(Elle s'essuie de nouveau dans sa grande serviette) Quand même, quand même, je vois que vous êtes BEAUCOUP mouillés ! Et ... si je vous proposais de rentrer à l'abri rapidement ?... OK ?... On a passé un bon moment dans la forêt, non ?
Qu'est-ce qu'on a appris aujourd'hui, dites-moi ? Les sangliers oui ! Allez, y'a que moi qui sait où est le car, je vous l'ai dit !... Je vous y conduis par le raccourci si vous répondez correctement à cette question : que préfère manger les sangliers ? Ah ! Les vers de terre ! Bravo, vous l'avez retenu !
(En aparté) Eh bien, ils auront au moins appris une chose aujourd'hui, et moi j'ai plus qu'à faire une déclaration d'accident du travail, maudit sanglier...
(Elle se retourne et part en boitant) Allez en route, et sans bousculade...

Les textes présentés ci-dessus sont sous la responsabilité de leur auteur. Ils sont quasiment le fruit brut qui a été cueilli en fin de séance... sans filet !
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